Définition
La radinerie est une notion souvent associée à la gestion frugale de l’argent. Un·e radin·e est une personne qui gère à l’extrême ses finances et qui éprouve des difficultés à dépenser son argent, même quand cela se justifie. La radinerie est un comportement connoté péjorativement, elle est donc à ne pas confondre avec le fait d’économiser et de gérer ses finances avec prudence, ce qui est une qualité louable.
Le rapport à l’argent est la manière dont une personne perçoit, gère et utilise l’argent. Il peut être influencé par de nombreux facteurs, notamment la culture, la classe sociale, le genre, l’éducation, etc.
Lorsque les femmes « osent » parler d’argent, il n’est pas rare qu’elles se voient affublées de l’étiquette de « radines », comme si c’était un domaine duquel elles étaient d’emblée exclues, que si elles s’y intéressent, c’est parce qu’elles poursuivent des objectifs immoraux.
BRIBES DE Récits
« Je travaille dans un domaine très compétitif, et la prudence financière a toujours été ma priorité. J’ai appris à économiser et à investir, ce qui m’a permis de réussir financièrement. Cependant, mes collègues masculins m’ont surnommée “Madame Oursin-dans-les-poches” à cause de mes habitudes d’économie. Au lieu de reconnaître mes compétences, on m’a réduite à ce stéréotype de femme avare, ce que je trouve injuste. »
« Je proviens d’un milieu modeste. Mon compagnon est originaire d’une famille très fortunée, bien plus que la mienne. Ses parents n’ont jamais été favorables à notre union et nous ont toujours mis des bâtons dans les roues, convaincus que j’étais là uniquement pour profiter de leur argent. »
UN PEU DE RECUL
Les stéréotypes de radinerie associés aux femmes ont des racines profondes, on les retrouve par exemple dans les récits mentionnant les sirènes, qui dupent et trompent les marins pour leur voler leurs richesses. Dans de nombreuses cultures, les femmes ont été perçues comme étant responsables de la gestion du budget familial, ce qui a contribué à renforcer le stéréotype de la femme radine. Or, bien souvent, il est plus juste de considérer que les hommes gèrent la fortune et les femmes la pauvreté (Le couple et l’argent, Titiou Lecoq, p.97), elles ont pour mission de « faire en sorte que le ménage s’en sorte ». Cela implique qu’elles se débrouillent et trouvent des astuces pour échapper aux effets de la misère, elles portent les inquiétudes et les tracas face aux dettes. Les blagues et idées reçues assimilant les femmes à des croqueuses de diamants ou à des paniers percés ne sont finalement qu’une énième manière d’invisibiliser le travail gratuit qu’elles fournissent au quotidien. Il en va de même lorsque l’on évoque les « promotions canapés » ou les allusions quant à la recherche d’un mari fortuné : on réduit les femmes à des charmeuses ne pouvant s’enrichir qu’en exploitant leur sexualité. Les stéréotypes négatifs associant femmes et argent ne manquent pas :
- Elles sont dépensières et irrationnelles.
- Elles sont incapables de gérer un budget.
- Elles sont intéressées par l’argent pour des raisons superficielles.
Ils sont souvent utilisés pour justifier les inégalités économiques entre les femmes et les hommes. Par exemple, ils peuvent être utilisés pour expliquer pourquoi les femmes ont des salaires plus bas que les hommes, ou pourquoi elles sont moins représentées dans les postes à responsabilités.
Des pistes pour agir
Sans surprise, l’on retrouve autour de la problématique de la répartition des tâches domestiques l’influence des stéréotypes de genre. Les femmes continuent à être considérées comme plus douées, « naturellement formées » à la gestion du quotidien, à tout ce qui relève du soin, du nettoyage, etc. Tant dans la sphère privée que publique, il reste fortement nécessaire de contrer ces normes de genre traditionnelles et essentialistes et de promouvoir une plus grande répartition des charges.
Repenser les représentations des femmes dans les médias et la culture populaire. Cela passe par la représentation de femmes qui travaillent, qui gagnent de l’argent et qui gèrent leurs finances de manière responsable.
Organiser des événements et des rencontres entre femmes pour échanger sur leurs expériences et leurs connaissances en matière d’argent. Cela pourrait créer un espace de partage et de soutien pour les femmes qui souhaitent améliorer leur rapport à l’argent.
Créer des médias et des contenus culturels qui mettent en avant des femmes fortes et indépendantes sur le plan financier. Cela pourrait contribuer à changer les représentations des femmes dans la société.
Sensibiliser les jeunes (et moins jeunes) aux biais sexistes en matière d’argent. Cela peut se faire à travers l’éducation, la sensibilisation des parents et des enseignant·e·s, ou encore la création de ressources pédagogiques spécifiques. Parler d’argent, ce n’est ni mal, ni sale. C’est s’intéresser à un élément omniprésent dans notre société capitaliste, et tout le monde en a le droit, peu importe son genre.
Développer des jeux et des applications éducatifs sur l’argent destiné aux femmes. Cela pourrait être un moyen ludique et accessible d’apprendre les bases de la finance.
Un peu d’inspiration…
- À écouter : Aux thunes, citoyennes ! Partie 1, Nouveau Départ | Interview Série « L’argent, ça s’apprend » | Héloïse Bolle & Insaff El Hassini, 16 février 2023.
- À lire : « Les femmes qui parlent d’argent ne sont pas des garces, elles sont lucides », Lucile Quillet, article sur le site Welcome to the jungle, disponible en ligne, 25 novembre 2021.